dimanche 7 janvier 2018

L'heure étale

oh il ne s'agit pas de grand chose.
un grand-père est mort.
 un autre être s'est révélé, 
a pris peur sous l'envergure de son aile.
un lien gémellaire noué de brumes.
et moi, qui ai voulu tout vider.

Il semble bien qu'on m'aime. Et que j'aime. Hélas, j'aime en général. Ou plutôt, j'aime l'Individu. Ainsi, qu'un voile vienne couvrir d'indistinction grise les perles sur le chemin, et c'est la pluie qui s'abbat sur les poitrines, comme l'hirondelle et sa chute rouge dans la neige. Les paupières de la mort ont cligné.

Alors que puis-je faire sinon un mot de réconfort ? Et quoi d'autre que l'ambigüité pour viser au coeur l'Individu ? queue de paon honoré d'êtres chers à mes mains.

L'heure étale.

N'est-ce pas ? Il va de certaines heures comme des trous d'eau. Il y baigne le ciel et la boue, le grain et le tesson. Et comment expliquer alors cette sorte de, je ne sais pas, débordement. L'onde fuit, atteint les régions sèches, et porte avec elle la promesse humide d'un retour du printemps. Et plus encore, du trou d'eau à la la grande bulle bleue. Et encore de l'heure de son départ, à l'intervalle infini, à l'éternel ici. N'est-ce pas dire dans la cloche de l'air une sorte de marque, la trace d'un verbe originel ?

ooh ... on entend les autres : "adieu"

mais non, non. Moi je dis "tous à l'eau où son heure baigne."

et spécialement, brouillonnement, je me suis enregistrée à la guitare ici.



sd euchariste

dimanche 17 septembre 2017

Lettre II

À ma chère Scons Dut,

Évidemment, l'exercice est centré sur soi-même. Alors, sautons la barrière de l'orgueil. Plaçons-nous où elle n'a plus lieu d'être. C'est-à-dire, avouons-le tout de suite, j'ai voulu écrire pour Scons Dut, une lettre d'amour.

Mais comment, après tant d'années à souffler l'élan à la flûte de ses lèvres, comment, moi qui fus ses yeux, son seul corps, comment ... comment dire

je t'aime

comment le dire sans que d'un coup, un bloc dur fissure notre espace, et qu'au bec de ton roseau, je ne sois soufflé.

Je t'aime, Scons Dut, et c'est là sentence définitive. D'un même élan, à mon pied qui épouse déjà le départ, à mon cri invertébré «je t'aime», de ce même élan surgit la scission.

Ô philoplasme sans âme auquelle ne manque que le corps. Tu n'étais que voix, aujourd'hui vers mes paumes dérobée. Tu n'es plus. Il ne persiste que l'écho. Un écho ? Quel écho ?

« je t'aime »

Han <3 <3 <3

pibsd, lion pygmée

mardi 27 juin 2017

Sorcière

Alors là, alors là,
Non, mais je m'attendais à tout
Non mais, à tout !

SAUF À ÇA.

J'ai presque besoin de toutes mes maigres ressources littéraires pour vous raconter ça. Ça. Ça vaut le détour, m'est avis.

C'est l'histoire du plus tendre geste qu'une mère puisse tirer aux oreilles de son enfant!

Ma mère est une sorcière.

Ma mère est une sorcière depuis que je suis toute petite. (Je suis l'aînée.) Et elle m'a toujours fasciné. Elle m'a toujours terrifié.
Πολλὰ τὰ δεινὰ κοὐδὲν μητηροὺ μοὺ δεινότερον πέλει !!

(que l'Académie me pardonne, ma grammaire a succombé au poids du cri !)


Contexte. Depuis un an, depuis ma séparation avec F., je suis la route, déclivité sereine, attendue de la décadence feutrée. C'est subtil, très subtil comme pente. Une pente douce comme une pêche de vigne. Je n'avais pas fini de tâter de la langue la perle d'ambre à sa peau que

BOUM ! Me voilà au Delta du Nil. Et mon sang, comme lui, connait comme ses frères
Alcool, Tabac, Cannabis, Cocaïne, MDMA, GHB etc. et ... la reine d'entre Toutes: LSD.
(Cocasserie de l'univers, je suis tombé amoureuse de L, qui est l'unique lettre manquante à mes initiales SD pour former ... un paradis artificiel)

Ma mère est une sorcière. Et toujours, je l'ai approché méfiante. Je lui ai tout caché. Mes premières cuites, mes premiers bisous, mes premières pipettes de paka (googlez, vous trouverez bien vite), etc.

J'ai quitté le foyer familial à 18 ans. Pour, comme beaucoup, venir étudier en France métropolitaine. 20 000 km. Voilà, une distance bien suffisante. Il s'est passé ce qui s'est passé ensuite (mon histoire avec F., les cancers de ma mère, les morts, etc.). Bref! Plus vite plus vite, pcq ça urge.

Aujourd'hui, cela faisait, je ne sais plus, 5 ou 6 mois (1 an ??) que je n'avais pas eu ma mère au téléphone. Elle a rêvé de moi cette semaine. Deux fois. Elle a rêvé que j'étais complètement "shootée". Ce sont ses mots.

Ô douce Maman
Si douce Maman
Cela prouve ton innocence
Depuis bien longtemps, on ne dit plus "shootée".
On dit "DÉFONCÉE".

Elle m'a demandé si je me droguais. Elle qui ne sait même pas que j'ai fumé une cigarette de son paquet quand j'avais 13 ou 14 ans. Elle m'a dit:

« Ma fille, répond-moi, très sincèrement
   – et il y avait tant de détresse dans sa voix –
Ma fille, répond-moi, est-ce que tu te drogues ? »
.
.
.
.
.
.
.
.
« Non, maman. » Et j'ai raccroché. Puis j'ai sorti la fiole.

*

Marquons une pause. Car je suppose, peu d'entre vous connaissent les effets du LSD. C'est, après tout ce que j'ai essayé, la plus subtile des drogues, la plus intriguante, la plus mystérieuse, celle qui peut vous apporter le plus, et par conséquent, vous détruire le plus. Contrairement à la MD, ce n'est pas une drogue pour les enfants.

Sa vertu principale est l'extrême concentration qu'elle procure. Imaginez une lance à incendie. En temps normal, vous êtes un tuyau d'arrosage. Sur la grande L, vous êtes une lance à incendie. Mais ce n'est pas de l'eau que vous projetez. C'est une sorte de substance unificatrice.

Quel que soit le point où vous vous concentrez, toutes les contingences s'ordonnent, comme un kaléidoscope, et forment une unité si flagrante qu'on ne s'étonne plus de la foule des faux prophètes qui y ont succombé.

Les stimuli visuels par exemple. Ce sont des stimuli bien réels. Et en temps normal, vous les apercevez très facilement. Par exemple, ces espèces de larves asticotaires quand vous scrutez le fond de vos paupières orangées par l'estival soleil. En temps normal, tout cela ne forme que bruit. Mais, sous L, vous saisissez des occurences, une multitude de καιροί, et alors naissent les hallucinations. Hallucinations qui ne sont l'ordonnancement par je ne sais quel partie du moi de l'ensemble disparate, confus, de ces stimuli. Notez au passage, que décrit ainsi, on peut dire la même chose de la Réalité. Et voilà, voilà, le noeud gordien entre l'Halluciné et le Réel-Perçu.

Là, je n'évoque que les stimuli visuels. Ce ne sont encore là que des jeux. On peut dire la même chose des stimuli auditifs, olfactifs, haptiques, etc. Et si vous voulez jouer encore un peu, considérez vos sens simultanément. Alors, viennent les hallucinations Synesthésiques. Voir les sons. Entendre les couleurs. Ce n'est pas plus impressionnant qu'applaudir en cadence.

Ensuite, viennent des choses plus sérieuses. Lorsque vous appliquez cette lance à incendie sur vous même. (Eh quoi ? Vous brûlez ?) Sur tel ou tel fragment de vie. Tel ou tel souvenir. Si, comme moi, vous avez une certaine propension à raconter des histoires, alors TOUT fait sens. Toutes choses, tout détail, s'insère dans une trame narrative. Vous en saisissez l'unité.

(Lance à incendie sur buisson ardent; il en sort de grandes tables)

Pire.

Vous retournez la chose. Et saisissez plusieurs unités. Toutes équivalentes. Autant d'histoires, comme ces faisceaux cohérents chers aux géomètres, sur le même germe. Ce minuscule détail de votre minuscule vie. Mon viol. Mon premier bisou. F. L. etc.

Pire.

Vous pouvez pénétrer très intimement chacun de ces univers. Ces petites monades. Si intimement, que vous oubliez même comment vous y êtes entrés (ah ! mais où est la sortie ?! ah ! mais si je sors de ce monde, quel monde vais-je rejoindre ? oh merde, attend, c'est ma chambre, ou c'est ma chambre ou c'est ma chambre ou c'est ma chambre ou c'est ma chambre ou c'est ma chambre, 



Je risque gros en fait). 

Et voilà. Ceci est un bad trip.

**

Ma mère est une sorcière.
Πολλὰ τὰ δεινὰ κοὐδὲν μητηροὺ μοὺ δεινότερον πέλει !!
Voyez comment.

ma mère
J'ai grandi ici.


C'est beau, n'est-ce pas ? Et là, là, faites très attention, c'est l'arbre où, suspendue à ma balançoire, je m'enivrais de l'ignorance de ce qui m'arrivera plus tard (aka, joie de l'enfance).


Cet arbre pousse très près de notre maison. Alors régulièrement, il faut l'élaguer. Sinon, les intempéries pourraient corrompre quelques branches trop épaisses pour notre toit. Il y a cinq ans, je crois, ma mère avait donc fait élaguer ce bel arbre. Il fallait couper une branche importante. Mmmh choix difficile pour un arbre si sacré. Elle récupéra cette branche, le confia à un ami sculpteur, qui en fit l'instrument-tiki que vous avez vu, sur la première photo. Elle me le donna, en ajoutant «Ma fille, il veillera sur toi.». Forcément, je répondis «ouais ouais».

Eh bien. Il y a une importance du petit mythe que certaines personnes, douées on ne sait comment, sont capables de produire. J'ai gardé cet instrument-tiki. Et j'ai gardé son histoire. Et les souvenirs qui vont avec. Et le chauderon où ma mère instilla, je ne sais comment, les épices qui allaient ramener, comme Obélix vers son sanglier, sa fille au foyer.

Cet après-midi, je me suis jeté dans un bad trip. Je dis bien jeter. Ce n'était pas un accident. J'ai volontairement pris une surdose. J'aurais pu à tout moment la calmer en mangeant beaucoup (la digestion brise la molécule), ou en buvant (l'alcool dissout la molécule). Je n'ai mangé que très peu. Je n'ai bu que de l'eau. Pour éviter l'évanouissement. Pour endurer. Pour finalement regretter. Mais là c'est trop tard.

On atteint des régions du tourment ... je ne sais même pas comment en parler. Il me semble que toute l'Iliade, toute l'Odyssée, pourraient en découler. Et il y a des beautés dans ces régions ! Calypso ... je crois bien l'avoir aperçue (ou bien, est-ce encore une histoire que je me/vous raconte ?).

De l'extérieur (car on garde en plus cet oeil extérieur à partir duquel on se juge permanément), c'est pitoyable : à demi-nue, sur le sol de son appartement, jonchée de clopes volées au voisin, pire ! le Zarathoustra de Nietzsche juste à côté !! (non mais ce cliché quoi !). Heureusement, j'avais le tome I d'O. Messiaen, celui qui traite du rythme.

Scène reconstituée.
Et là. Eh bien, je me rappelle ce petit mythe familial. J'ai le tiki sous les yeux. Sous les mains. Je le prend. Avec la pointe, je marque un rythme sur sa peau. Ce rythme est doux à mes oreilles. Un chant de grand-mère sous l'ourlet des vagues du lagon où j'ai grandi. Il a des yeux ce tiki. Il a un visage ce tiki. Il incarne ma mère.

AAAaaaaahh ! Sorcière ! ma si adorée sorcière !

Et voilà le sort est jeté ! Ce mythe me submerge. Ce tiki est ma mère. Il est dans mon appartement. Ma mère voit mon appartement.


Et ...... merde, merde, j'ai pas fait mon lit ! La vaisselle, vite... ouf, ça va je l'avais faite. Et merde, merde, que je cache ces clopes. Et la boîte de Pandore, faut pas que Maman la voit !

et merde merde, je vais m'en prendre une, elle va faire tellement mal ... là pour le coup, je l'aurais bien cherchée.

***

Alors ? Évidemment, tout ceci est brodé d'histoires. On ne sait plus tout à fait distinguer le vrai du faux. Ma mère est-elle réellement une sorcière ? Mais comment a-t-elle fait ce rêve ? Et comment depuis toutes ces années a-t-elle pu construire une histoire qui me sauvera aujourd'hui ?


Une dernière chose. Mon prénom. Mon vrai prénom. Même à Tahiti, il est rare. Et on s'est moqué de moi à l'école à cause de sa rareté. Même à Tahiti. 

Et je ne le dirai pas ici, car 1. vous connaissez mes habitudes quant à mon anonymat, et 2. je fais de mon nom un nom sacré, tabou. (privilège du Créateur). Mais depuis toute petite déjà, ma mère me rassurait. Et voici le message qu'elle m'a envoyée aujourd'hui, à 19:00. (je masque l'inessentiel)

« Mettre de l'ordre dans sa maison, c'est aussi mettre de l'ordre dans sa vie ! Je t'aime ma fille et je te demande pardon pour avoir été trop agressive envers toi hier au tél [ce matin pour moi, -12h de décalage horaire]. Je me faisais du souci pour toi. N'oublie pas que tes Ancêtres veillent sur toi et quoiqu'il t'arrive de fâcheux, pense à leur demander de l'aide. Ils sont nombreux autour de toi à t'aider. Si seulement tu pouvais prendre conscience du Mana qui est en toi, Enfant Royal que tu es, portant un prénom qui n'est pas des moindres ***** grand guerrier qui arrivait toujours à se redresser et à gagner tous ses combats. Fais honneur à ce nom royal. Sois combattive et surtout aie une grande confiance (une foi) en toi. Ta maman qui ne cesse de veiller sur toi. »

Je le reproduis ainsi. Je vous présente ma mère. Vous avez-vu ? Vous reconnaissez pas les prémices du délire ? C'est ma mère. Ne vous moquez pas. Ces paroles, aussi mièvres qu'elles puissent être, pourraient vous toucher beaucoup plus profondément que vous ne le croyez.

Ma mère, comme toutes les mères, est une sorcière. Comme toutes les mères, deinoteron parmi les sorcières.

sd reconnaissante

jeudi 8 juin 2017

La honte

Qu'on me laisse rapporter ici un seul instant. Un bref instant. Qui requiert, pourtant, afin qu'on en saisisse la piqüre, un certain développement.

Cet instant, le voici. Je me trouvais, au sol, sur mon flanc droit. Une foule était amassée tout autour. Inquiète et festive. Je venais de m'évanouir à la terrasse d'un bar. Il devait être minuit. Et les lumières de l'ambulance clignaient déjà leur paupières de chat. Du sang coulait de mon front.

L'évanouissement est comme une tempête nerveuse. Il n'y a rien de très original ici. Et comme toute tempête, sa fin annonce comme une sorte de paix, un repos qu'on dirait «mérité».

Ainsi me trouvai-je, confortablement disposée sur mon flanc droit, observant, depuis l'intérieur serein de mon crâne, la série d'événements minuscules sur les visages, les sourires, et les mains qui se touchaient. Et celles qui ne se touchaient pas.

Perdue dans cette contemplation, comme le pêcheur dont l'âme déjà titube au bord de l'horizon, et passant sa ligne au-dessus d'autres lignes, prétend espérer qu'un poisson inconnu lui rappelle la force des profondeurs, je remarquai :
Deux yeux, suppliants. Et des lèvres, inaudiblement, suppliaient « S'il te plaît, relève-toi. » Dont la danse, et la complication de leurs commissures, ajoutaient « Ne me fais pas honte. »
Ô quel étrangeté ! Ces yeux amis, connus depuis si longtemps, à qui je fais honte. Ces mêmes yeux, succombants, qui détournent leurs rayons vers des lieux plus propices, pleins de sociabilité familière, et des trajectoires fixes de la Fête (les occasions sociales ont aussi leur mécanique céleste). Ces yeux, perdus au front de ce visage qui quelques heures auparavant m'assurait de son indéfectible amitié.

Émue, j'ajoutais intérieurement :
Ô étrange distance! Quelle faute es-tu en train de commettre ? Celle à qui tu jurais amitié indéfectible, gisante ensanglantée, celle-là même te fait maintenant honte ? Parce que l'attention, et la foule, pleins de bruit, ont orienté vers moi leurs feux, et parce que notre amitié, si liante, dévie vers toi leurs ardeurs et leurs rumeurs improbables ? Et tu crains maintenant pour toi, et tu fuis.
J'étais alors si près de définir mon jugement, comme une chose bien assise. Et puis.

Et puis. J'aime mon amie. Et si objectivement il y eut bien là une faiblesse de l'acte, je ramenai à ma mémoire les circonstances atténuantes.

Ce soir-là, elle revoyait ce garçon, connu depuis quelques mois, une amourette qui, deux jours auparavant, s'était transformée par l'annonce d'une grossesse inattendue, et les courants contradictoires des forces de réflexion, et l'avortement auréolé de son point d'interrogation. Ce garçon, elle le revoyait. Ils avaient des choses à se dire. Des choses sérieuses, c'est-à-dire des choses faites de questions anodines où s'engage le peuple de leurs années futures.

Il voulait qu'elle avorte. Elle demandait un temps de réflexion, une bulle pour respirer. Lui, trop jeune, a paniqué (qui ne paniquerait pas ?). Il a lui aussi succombé aux charmes des petites actions, au renoncement de la hauteur, à la faiblesse de caractère.

Elle demandait un temps. Trois jours. De repos. Ce n'était pas son premier avortement. Mais, elle demandait trois jours. N'était-ce pas son ventre après tout ? Était-ce vraiment trop demander que trois jours de réflexion ? Non pas qu'elle hésitât franchement entre les deux alternatives: avorter ou ne pas avorter. La chose, la question, cet énorme point d'interrogation ne se présentait tout simplement pas à elle de cette façon. Il s'agissait d'accueillir une idée, d'en explorer une partie des conséquences, au moins en esprit. Je dis idée, mais c'est encore trop abstrait. Il s'agissait d'accueillir un événement, et d'en apprécier les motifs diffractés.

Et perdue aux confluents de projections, de regrets, de questionnements, de décisions sans doute hâtives. Perdue et compliquée des rumeurs connues de la fête, et du tintement des verres, et des regards qui traversent la foule. Une foule amassée, comme dans un cirque, autour de celle qui, quelques jours auparavant, lui assurait qu'elle l'aiderait en toutes circonstances. Celle-là, même, qui gisait, ensanglantée, un demi-sourire d'outre-tombe aux coins des lèvres. Un rouge comme aux faces des clowns.
S'il te plaît, relève-toi. Ne me fais pas honte ... (aide-moi, je t'en prie)
Je me relevai, entrai dans l'ambulance, et passai la nuit aux urgences, d'où je sortis assurée de l'absence de trauma crânien.

Le lendemain, sous un blanc soleil, laissant filer les doigts du vents aux chevelures des palmiers, j'ajoutais intérieurement :
... évidemment, je t'aiderai ...
sd

vendredi 26 mai 2017

De profundis clamavi ad te, Caele

Insignifiante majesté
   du ciel blanchi d'ailes.

Le vol des oiseaux,
   en cadence sur les vents,
Tous, acteurs aux origines obscures
Ici se rencontrent
Au seuil de mon regard.

Et rien, pourtant, ne m'appelle à eux. Mon oeil scrutateur coordonne leurs présences, et saisit les lignes d'incidence,

i.e., le Rythme.

Musique, par là, les rejoint
Et forment Danse, qui n'exprime rien.

Puisqu'elle ne réfère à rien. La valeur créée ne s'établit que pour eux. Cela fait
leur gratuité.

Et voilà, en un instant,
   presque
Réunies toutes les Muses.

Seule reste, à l'écart
   aveugle, sourde, infirme,
Poésie,
Sous son cerisier
   au tronc noueux,
   aux rameaux noirs,
   aux promesses de blancheurs printanières,
Qui, impossiblement,
Les attrape dans son filet de feuilles mortes,
Ailes jadis d'anges vibrantes,
Aujourd'hui cendres ...

De profundis clamavi ad te,
Insignifiante majesté aux gestes blanchis d'ailes.

sd reduite à l'absurde.

mercredi 10 mai 2017

L'os et la fumée

Aux mortels
   La graisse et la viande.
Aux dieux
   L'os et la fumée.

Alors, moi, poupée de sat-a-i-n sur les planches du théâtre,
Je fume l'os d'une clope.

sd

lundi 8 mai 2017

Ἑαυτοκαιρός

Monde absurde, offre donc encore
   Tes sons gratuits
   Ton rythme labyrinthique
   Et la trame de points-clés
      καιροί.

J'y placerai, en Créatrice,
   De belles pensées
   De belles actions
Toutes aussi insignifiantes que toi, ô Monde
C'est-à-dire
   Toutes aussi gratuites
   Toutes aussi libres et révoltés
C'est-à-dire
   Toutes aussi
      Sataniques.

Et si les lumières de la mort
Déjà, clignent leurs yeux de chats sur mon nombril,
Eh bien,
Que je fasse de
   Moi-même un point clé
      ἑαυτοκαιρός.

Support gratuit
   D'une belle action
   D'une belle pensée

La tienne peut-être ? Lectrice, lecteur, 
Non ?

Places-y une beauté.
Une fleur.
Une rose s'il te plaît,
   Fleur Bleue de Poésie.


sd nodale