samedi 14 juin 2014

Naissance

Je suis venue au monde comme une boule de pâte. Sans yeux, sans oreilles, sans bouche, sans peau.

Alors je pousserai deux yeux, deux oreilles, une bouche et une peau. Et je pousserai encore des yeux, et des oreilles, et des bouches et de la peau. Un régiment de dent dans les plis des auricules. Et des plaques de papilles, des forêts de cils, aux lacs de cornée. J'accrocherai à mes omoplates mille et une membranes, ailes d'où scintilleront, au fond du noir, les regards vifs de chauve-souris étonnées. Je pousserai encore tous les sens manquants, pour compléter mon état.

Comme les vastes cercles que tracent les aigles de l'azur, je concentrerai dans mon rayon constant, l'amplitude de la grande bille bleue. Je percerai son sein pour que s'écoule, à la surface de ma perception, les résonnances profondes des oiseaux hypochtones. Ces anges de silices, aux flèches d'une cathédrale engloutie, souffleront, dans leurs syringes nickelés, le chant du réveil. Et des peuples magmoïdes s'élèveront. Et ils pousseront des îles au vaste bleu.

Et j'absorberai, d'une manière complète, cette beauté naissante, par l'agrandissement final de mon être: à devenir Béance


S. D.

Ma lectrice, ou mon lecteur, me pardonnera, je l'espère, l'omission du point final. Je n'ai pas osé clore le bec au Chaos.

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