samedi 5 juillet 2014

Les Pages Ratées : Supervielle

Aux oiseaux

Paroares, rolliers, calandres, ramphocèles,
Vives flammes, oiseaux arrachés au soleil,
Dispersez, dispersez, dispersez le cruel
Sommeil qui va saisir mes mentales prunelles!

Fringilles, est-ce vous, euphones, est-ce vous,
Qui viendrez émouvoir de rémiges lumières
Cette torpeur qui veut se croire coutumière
Et qui renonce au jour n'en sachant plus le goût ?

Libre, je veux enfin dépasser l'heure étale,
Voir le ciel délirer sous une effusion
D'hirondelles criant mille autres horizons,
Vivre, enfin rassuré, ma douceur cérébrale.

S'il le faut, pour briser des tristesses durcies,
Je hélerai, du seuil des secrètes forêts,
Un vol haché de verts et rouges perroquets
Qui feront éclater mon âme en éclaircies.

Supervielle, Débarcadères

Voici donc un nouvel exemple de page ratée. Et quel exemple ! Mais que veut dire Mr. Supervielle ? Vous l'aurez très rapidement compris, chère lectrice, cher lecteur, que notre poète établit devans nous le bâti d'un caprice bien puéril. On se demande, avec raison, comment il est possible de décrire aussi mal cette persistance agaçante qu'ont les enfants à courir dans les jardins, haut-lieux de grandes batailles, sauter au dessus des ruisseaux-fleuves, ou exhumer des reliques ancestrales sous des souches de bois plus ancestrales encore alors même qu'il se fait tard, et qu'il conviendrait mieux à ces enfant d'aller dormir au lieu de jouer. Car que dit l'auteur de ces lignes sinon qu'il veut gambader encore parmi la foule des coqs et des poules, toute pleine de plumes multicolores, malgré sa fatigue, son besoin tout naturel de dormir pour reposer ce jeune corps ? Ainsi reformulerai-je les choses de la façon suivante:

Aux gallinacés

Poules et coqs, et vous, poussins,
Venez, venez, on va jouer
Même si j'ai sommeil.

Oui, oui, ha ha, vous aussi,
Canards, et cannetons, et petites poules d'eau,
Vous voulez jouer ?

Je sais qu'il faut que j'aille dormir
Et je suis bien fatigué
Mais vous êtes tellement drôles.

Allons, allons derrière le grillage,
Je vais vous libérer.
Ha ha, on va bien rigoler !

N'est-ce pas bien meilleur et bien plus compréhensible ainsi ?
S. D.