samedi 21 mai 2016

Le Grand Méchant Poux

On m'a dit qu'il existât, jadis, un être qui, en tous les domaines de la méchanceté, creusa si profond que l'Univers entier s'en trouva presque énucléé. Je vais vous raconter son histoire.

Il n'était pas ignorant de sa condition. De la paume de main du docteur s'écrasant de tout son poids sur la rondeur nouveau-née de son postérieur, descendit, sautillant comme une puce, le noir dessein de son existence. Il le méditera toute sa vie.

Il questionna le néon clignotant, demandant comment pourrais-je compléter ce projet, la sphère du mal est comprimée depuis trop longtemps déjà, une voix monte en moi, plus bouillante encore que la lave ou le café brûlé: que j'aille éclater les parois de ce sombre oeuf à la coque!

Une dame, trop âgée pour que la politesse de l'auteure de ces lignes ose en préciser la valeur. Une dame donc, et très pieuse, s'engageait alors sur le passage piéton, attentivement attentive à la couleur rosacée du lumignon de la Loi.

Lui, émergé de son sommeil réparateur par la plainte klaxonnante du véhicule ci-joint, se releva du milieu du passage clouté, et croisa le regard ahuri de la vieille.

Oh! quelle nouvelle occasion criminelle saute aux bras aimants de mes yeux! Dois-je la pousser ? Lui arracher son sac ? Défaire le lacet de sa chaussure ? Aah! non, non, et re-non de diou! Je vois le piège, vieille connasse. Mon lot ne sera pas si réduit. Mon ambition veut embraser le ciel, la terre, et la mer aussi! Et voici qu'au chef cuisinier, on présente une vieille saucisse en sauce tomate trop sucré. Nenni !

Les ailes frétillantes de la haine se dodelinant sous les omoplates de sa chemise, il arrêta la circulation d'un geste. Le monde s'arrête. Le Soleil fixe son oeil. Le ciel fixe son bleu. Et l'aigle immobile, suspendu au creux de l'air, attend laborieusement le signal pour reprendre son battement.

La dame passe. Lentement. Gentiment. Atteint l'autre rive. Elle remercie cet énergumène qui tient le temps entre le pouce et l'index. Comme un mort remercie le passeur Charon, ce vieux bougre à la bouche pleine de pièces d'or - quelle dentition!

Assuré de la complétion de son forfait, notre Temporisateur improvisé décolle les molleurs dodues de son pouce et de son index. La circulation reprend. Le Soleil louche de nouveau. Le ciel continue sa peinturluration habituelle (et de très mauvais goût, si vous me permettez). L'aigle, par contre, n'a pas survécu, et tomba si raide qu'on voit encore de nos jours, le vertical trait au-dessus de la scène.

!
Scons Dut

l'Huître Encyclopédique

il arrive à l'âme troublée, comme flaque sous gravillon, de dissiper ses cercles concentriques au rivage d'une lecture attentive méticuleuse.

mais que lire ?

les cathédrales de pierres solides comme des arguments ? non; il faut à ces clartés le plan lisse d'un miroir.

un poème ? à quoi bon; colloïdal peut-être mais intelligible encore.

Non. À qui se trouve être une volute dans un petit pot de glaire, de ceux qu'on retrouve au chevet des malades au carrelage blanc, la lecture d'un dictionnaire total, dans l'ordre indiqué (peu importe), suffira. Petit a, grand A, petit b, grand B, petit c, grand C, petit d, grand D,

petit tout petit et caetera

chez moi    loin      sans moi        on meurt sans prévenir
sd