dimanche 31 juillet 2016

Complexe de supériorité

Les jours pairs, je me représente comme ce carreau plat sous le paillasson.  À l'entrée d'un appartement neuf que personne n'habite.

Les jours impairs, je suis plus grande que l'orbe de vos jours. Une longue colonne armée, fleuve de bronze, hérissée d'éclairs jaunes ! La rage au tapis, les bouches pleines de dents, le croc que couronne la goutte venimeuse.

Des blocs se sont détachés au fond des terres. Il roule un sourd fracas, écho tremblant d'outre-tombe. La longue, lente et lourde foulée du marcheur sûr comme un boeuf. Troupeau borné à l'infini.

C'est l'heure des transhumances. Il est temps d'aller faire paître ces soleils tâchetés. Au rivage du ciel, sur la pointe rocheuse qui perce le bleu. Plage verticale, asile d'étoiles mortes, drossées par l'azur. Mangez, corbeaux aux rémiges métalliques, astres noires, roulez.

Les jours impairs, j'ai entre le pouce et l'index la puissante clé-pilier. Un tour de ma phalange, et je fais danser le monde.

Cela peut-être beau. Jusqu'à l'aube rouge, où je choisis l'être le plus faible. Cible du crime à venir. J'arrache le monde autour de lui et l'écrase à sa face. J'ai choisi l'être le plus faible.

Et du monde arraché, il ne restera que lui. Je n'ai même pas, finalement, la force d'une seule brume.

sd

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